Le défi positif, Thierry JANSSEN 2011

Le défi positif

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Thierry JANSSEN (LLL 2011)

Nous avons tous tendance à nous focaliser sur le négatif, plutôt que sur le positif. POURQUOI ?….. Plusieurs hypothèses s’offrent à nous : En termes de survie, il est essentiel d’identifier une menace potentielle qui menacerait notre survie, pour assurer la pérennité de notre espèce. Nous voulons tous nous séparer du négatif en oubliant de cultiver le positif, comme si nous voulions soigner la maladie avant de promouvoir la bonne santé.

La psychologie clinique (étymologie : kliné = lit, la médecine exercée au lit des malades.) assimila les patients à des être passifs, processus de déresponsabilisation des patients, renforcé par la prise de médicaments.

  • LearnedOptimismMartinSeligman Martin SELIGMAN commence en 1960 sa carrière de psychologue, il introduit le concept de « résignation acquise » (learned helplesness) C’est la conviction de ne pouvoir aboutir à un résultat, ce qui entraîne la résignation et favorise la dépression.
  • Cette théorie est l’une des plus fécondes pour expliquer la dépression. « L’optimismes appris » est une théorie introduite par Martin SELIGMAN.
  • Cette théorie met en avant le fait que notre personnalité n’est pas définitivement déterminée :
  • Les pessimistes peuvent décider de changer leur interprétation du monde. Il créé une nouvelle discipline : « la psychologie positive » discipline « à côté », « en plus », de la psychiatrie et de la psychologie classiques. La Psychologie Positive est l’étude scientifique des conditions et des processus qui contribuent au fonctionnement optimal des individus, groupes, institutions, pour s’épanouir et rester en bonne santé (2000).
  • La Psychologie Positive  est l’héritière des psychologues humanistes (Victor FRANKL, Carl ROGERS), elle-même héritière de la philosophie, nourrie au sein de la phénoménologie (Edmund Husserl, Georg Hegel).

 

  • Bonheur et Santé Hédonisme : Au IVème siècle avant notre ère, ARISTIPPE, disciple de SOCRATE, définit le Bonheur comme le Plaisir (hedone en grec), c’est-à-dire le Plaisir de l’esprit et du corps, la jouissance étant le but ultime.
  • A la même période, EPICURE définit le Plaisir comme le but ultime de la vie. Le Plaisir est l’absence de douleur, c’est-à-dire Ataraxiequiétude absolue de lesprit) et Apathie (absence de passion).
  • Pour cela, il faut connaître ses propres limites. L’Epicurisme est l’hédonisme ascétique (il est impossible d’être heureux sans être sage).

 Il faut attendre la fin du XVIIIème siècle pour bannir l’idée chrétienne du pêché original, donner espoir d’accéder au Paradis sur Terre. Le droit à la recherche du Bonheur est inscrit dans la Déclaration d’Indépendance des Etats Unis (1776). Eudémonisme : Au VIIIème siècle avant notre ère, le poète HESIODE utilise le vocabulaire « eudémonisme », repris 4000 ans plus tard pas SOCRATE, PLATON et ARISTOTE.

  • L’étymologie : EU = bon, DAIMON = génie personnel interne. L’Eudémonisme consiste à laisser notre « bon génie » inspirer notre vie.
  • Pour ARISTOTE, le Plaisir est la conséquence du Bonheur. Pour les adeptes du Stoïcisme, CICERON, SENEQUE, EPICTETE, Marc AURELE, le Bonheur dépend toujours de circonstances extérieures. Seules la raison et la volonté peuvent rendre heureux, d’où l’importance de discerner ce qui est ou non de notre pouvoir, d’avoir confiance dans l’ordre du Cosmos, et de ne pas désirer autre chose que ce qui est. Eriger une citadelle intérieure au service de la Vertu.
  • Cela fait penser aux quatre nobles vérités proposées par Bouddha. Bouddhisme et stoïcisme sont deux philosophies eudémonistes, pour qui le bonheur est la valeur suprême, le critère ultime de choix des actions humaines.
  • Elles prônent l’ATAXIE et l’APATHIE, associées à la rationalité, à la volonté et à la sagesse vertueuse.

 « Le « Bonheur Authentique » est un état subjectif de bien être,

associé à l’absence d’ émotions conflictuelles telles que la peur, la tristesse, la colère, et,

accompagné du sentiment de vivre une vie qui vaut la peine d’être vécue. »

(Tal Ben Shahar).

  •  Il n’y a aucune recette unique, le panachage de trois piliers : le Plaisirl’Engagement, le Sens, seront les balises sur le chemin pour atteindre le Bonheur.
  • L’aptitude au Bonheur est déterminée à 50% par nos chromosomes, mais cela n’oblige pas à être heureux. Les circonstances de notre vie influencent nos aptitudes génétiques déterminées au Bonheur, environ à hauteur de 10%.
  • Plus on vieillit, moins on cherche son bonheur dans le Plaisir (HEDONISME), et Plus on attache l’importance au fait de trouver du Sens (EUDEMONISME).
  • Le Sens permet d’affronter les frustrations les privations. Vieillir en restant heureux implique de pouvoir attribuer un sens aux expériences du passé, tout en trouvant une raison d’apprécier les moments du présent.
  •  Le « Bonheur authentique », de Seligman, est fait de Plaisirs et de Sens, emballé dans de la subjectivité du sentiment d’être Heureux, interdépendant de l’état de santé. Les émotions négatives, comme la peur, la tristesse, le dégoût, l’anxiété, la tristesse, la frustration sont nombreuses et spécifiques, elles apportent des réponses rapides et précises, adaptées au diverses menaces auxquelles nous sommes confrontés.
  • Ce résultat instantané apporte un bénéfice immédiat, d’où son avantage adaptatif immédiat. Les émotions positives, comme la joie, la surprise, l’enthousiasme, le contentement, permettent d’Elargir (broaden) notre sensation de la réalité et de la Construire (build). Théorie de Barbara Frerickson : « broaden-and-build theory of positive emotions ».
  • Les états émotionnels positifs favorisent la réception de nouvelles informations, créativité, flexibilité de la pensée, élaboration de raisonnement inhabituels, et résolution de problèmes difficiles. Cultiver les émotions positives, lorsqu’on est malade ne supprime pas la douleur, mais, atténue la souffrance. Moins souffrir peut accélérer le processus de guérison, ou éviter l’aggravation.
  • ctah-amygdale-cortexLes états émotionnel positifs sont liés à l’activation du cortex cérébral préfrontal gauche, diminuent les taux sanguins de l’adrénaline (médullo-surrénales) et du cortisol (corticosurrénale), hormones du stress, stimulent les défenses immunitaires réduisent la réponse inflammatoire liée au stress augmentent la production d’ocytocine( hormone produite par la post-hypophyse), l’hormone de croissance et les endorphines.

Le positif ne se résume pas à l’absence de négatif. ATTENTION au sens des mots :

  • Les mots Positifs et Négatifs peuvent être réducteurs, subjectifs, voire manichéens.
  • Les effets des émotions positives ne sont pas toujours positifs : un malade trop confiant peut arrêter, à tort, sa médicamentation.
  • Les effets des émotions négatives ne sont pas toujours négatifs : la peur éprouvée permet d’éviter un danger. Il serait intéressant de substituer Agréable à Positif, et Désagréable à Négatif, pour plus d’objectivité, de justesse dans la quête du sens.

Notre aptitude à être heureux dépend de 50% de notre prédisposition génétique 10% des circonstances de notre vie, d’éléments extérieurs à notre volonté, influencent cette aptitude 40% de notre bonheur relève de notre investissement personnel.

  • Dans la pratique d’une activité autotélique (étymologie grecque, autos :soi-même et telos :but. Une activité est autotélique lorsqu’elle est entreprise sans autre but qu’elle-même.) les personne se sentent « emportés dans un courant », « portés par un flux », « totalement immergées » dans cette activité.
  • Cette expérience optimale est accessible à tout le monde, mais plus facilement chez des adultes ouverts, curieux, originaux, créatifs, indépendants, responsables, aptes à connaitre d’avantages d’expériences optimales.
  •  Pour éprouver cette sensation d’Expérience Optimale, il FAUT une INTENTION dans l’engagement, mobiliser des compétences de qualité, une bonne dose de concentration, peu de stress (incompatible avec l’Expérience Optimale) et une volonté de s’engager et d’agir, ce qui peut être vécu comme fatiguant et contraignant.

La voie qui conduit à l’Expérience Optimale est étroite ! Pour Martin SELIGMAN, il y a trois moyens nécessaires pour atteindre le Bonheur Authentique : Pratiquer des activités autotéliques pour vivre des Expériences Optimales. Rechercher des sensations et des émotions agréables dans une démarche hédoniste.(le propre de la jeunesse). Rechercher le sens selon un principe eudémoniste.(le propre de la vieillesse).

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    La méditation en pleine conscience (Mindfulness meditation) c’est porter son attention sur ce qui se manifeste à l’instant présent, en soi et à l’extérieur de soi, sans jugement de valeur, avec la seule intention de constater, et d’accueillir de façon bienveillante.
  • Richard DAVIDSON, professeur de psychiatrie à l’Université du Wisconsin à Madison, en 1990, a identifié les régions cérébrales de nos émotions.
  • Certaines zones du Cortex préfrontal DROIT sont liées à l’expression d’émotions négatives, comme la peur, la tristesse. L’activation de zones du Cortex Préfrontal GAUCHE est liée à l’émergence d’émotions positives, comme la joie ou l’enthousiasme.
  • Le rapport d’activité des zones émotionnelles DROIT et GAUCHE détermine un répertoire émotionnel de base, propre à chaque individu.
  • Plus le rapport indique une prédominance d’activité à DROITE, plus le répertoire émotionnel de base est orienté vers la tristesse, le stress et l’angoisse.
  • Plus le rapport indique une prédominance d’activité à GAUCHE, plus le répertoire émotionnel de base est orienté vers la joie, la sérénité. Ce rapport est déterminé génétiquement, en PARTIE, il faut se rappeler des 50% (génétique), 10% (éléments extérieurs) et 40% (investissement personnel) évoqués plus haut. Le répertoire émotionnel de base n’est pas fixé DÉFINITIVEMENT, car le cerveau est malléable, modulable, on parle de plasticité cérébrale.image-singe-meditation1

 L’entraînement à la pleine conscience augmente l’activité préfrontale GAUCHE, qui augmente la production d’anticorps pour le système immunitaire.

  • L’entraînement à la pleine conscience est retrouve dans la pratique du yoga, de qi gong, de tai ji quan, cela permet d’autoréguler l’attention, le moment présent, le souffle, la prise de conscience corporelle, le ressenti de pensées et l’acceptation dans la bienveillance se laissant gagner par une impression de flux, comme une méditation en mouvement, une Expérience Optimale.
  • Le dogme psychanalytique : on ne peut guérir une souffrance psychique sans un retour dans le passé, semble contredit par la Méditation en pleine conscience. L’entraînement à la pleine conscience met en place les conditions neurologiques, émotionnelles et intellectuelles nécessaires pour apaiser cette souffrance et entreprendre un processus de guérison.
  •  Méditer en pleine conscience crée un espace intérieur où il est possible de prendre le recul nécessaire pour redéfinir ce que nous souhaitons être et ce que nous voulons faire. S’entraîner être le plus conscient est un acte libérateur et transformateur, un outil existentiel positif. Face à l’adversité, attribuer un sens constructif est le meilleur moyen de rester maître de son existence et de préserver sa vitalité.

« Etre optimiste est un devoir moral »

Karl POPPER (philosophe)

  •  Le pessimisme n’est valable que dans le court terme : pessimisme positif. Face à certaines situations menaçantes, il est vital d’adopter une attitude pessimiste pour concentrer le maximum de ressources dans une réponse immédiate.
  • Une fois le danger écarté, il est nécessaire de revenir à un état d’esprit moins pessimiste, dans une vision à long terme. Donc optimisme et pessimisme sont utiles à l’anticipation, ces deux concepts jouent un rôle indispensable à la préservation de notre vie.
  • L’idéal serait de ne jamais rester enfermé dans l’une ou l’autre attitude, mais d’être flexible. Seligmann avec l’aide de Christopher Peterson, ont tenté de classifier, non pas de façon normative, mais de façon descriptive, sans jugement moral, en identifiant de façon psychologique et non philosophique en prenant le contre pied de la classification DSM : manuel diagnostique et statistique des maladie mentales, 1952 les aspects qui influençaient positivement la satisfaction l’accomplissement, et le bonheur des gens.
  • Dans le but d’obtenir un vocabulaire commun et des critères de référence.

Il ressort  24 qualités largement reconnues au sein de la plupart des cultures :

  • La créativité, la curiosité, l’ouverture d’esprit, le désir d’apprendre, le discernement (capacité à relativiser et à conseiller), la bravoure, la persévérance, l’intégrité, (authenticité, probité), la vitalité (l’enthousiasme), l’intelligence sociale, la bonté, l’amour, le sens de l’équité, la citoyenneté, (capacité à vivre et à travailler en groupe), le leadership (capacité à diriger), la maîtrise de soi, la prudence, la clémence (pardonner), l’humilité (la modestie), l’humour, l’appréciation de la beauté et de l’excellence la gratitude, l’espoir et la spiritualité.
  • L’analyse des grands textes religieux et philosophiques a permis de recenser 6 Vertus:
  • La sagesse, le courage, l’humanité, la justice, la tempérance, la transcendance.
  • Seligman et Peterson ont relié les 24 forces de caractère et les Vertus, afin d’établi une « classification VIA des forces du caractère et des vertus. » qui permet d’évaluer le développement optimal des individus.

 La VERTU de la sagesse est favorisée, s’exprime à travers la créativité, la curiosité, l’ouverture d’esprit, le désir d’apprendre, et le discernement

 La VERTU du courage, par la bravoure, la persévérance, l’intégrité et la vitalité,

La VERTU de l’humanité, par l’intelligence social, la bonté, l’amour,

La VERTU de la justice, par le sens de l’équité, la citoyenneté, le leadership

 La VERTU de la tempérance par la maîtrise de soi, la prudence, la clémence et l’humilité,

 La VERTU de la transcendance, par l’humour l’appréciation de la beauté, et de l’excellence, la gratitude, l’espoir et la spiritualité.

  • Face à un stress, deux réponses peuvent être attendues : « Fight or flight », combattre ou partir.
  • Et « Tend and befriend », s’occuper d’autrui et se prendre d’amitié pour autrui.
  • La seconde réaction, moins connue, inciterait les individus à créer du lien au lieu de rompre par la fuite ou le combat.
  • Cette réponse est plus fréquente chez les femmes, elle est liée à une hormone sécrétée par la posthypophyse : l’Ocytocine. Seligman et Peterson l’ont nommée : « Vertu d’Humanité », tendance innée à créer du lien, s’occuper des autres, de faire appel à trois forces de caractère :
  • L’intelligence sociale, dans le sens « intellegere », comprendre le monde et se comprendre soi-même.
  • La bonté, en s’opposant à l’égocentrisme.
  • L’amour, dans la relation aux autres.
  • Le plus simple pour mieux se connaître est de répondre au questionnaire VIA-IS mis au point par Peterson en 2004, disponible sur Internet : www.viacharacter.org, onglet « Surveys »

“Il n’y a pas de chemin vers le Bonheur,

le Bonheur est le chemin ”

Lao Tseu .

  • La bonne vie n’existe pas, il serait illusoire de le croire.
  • Par contre UNE bonne vie est possible, si nous veillons à utiliser le mieux possible nos forces, nos vertus personnelles au service des valeurs universelles : elle est forcément une démarche individuelle, dont le résultat sera toujours original et particulier.
  • Pour se diriger au mieux vers le Bonheur authentique, il serait important de… Savourer le Plaisir , Se concentrer (faire une seule chose à la fois, en conscience), Ralentir notre rythme effréné, on peut toujours faire plus, et si on choisissait de faire MOINS….
  • Diversifier et sous-doser les sources de plaisir, pour éviter l’accoutumance, faire duuuuuuuuuurer le plaisir, Fractionner, pour faire durer notre contentement,  Simplifier, pour plus de félicité. Remercier, permet de prendre conscience du plaisir éprouvé. Célébrer, partager, faire la fête .Créer du Flux .Susciter les activités autotéliques.
  • Lutter contre la procrastination, remettre au lendemain est l’ennemi du Flux . Développer des forces et des Vertus. Un compromis entre notre désir de plaisir, notre besoin de sens et les atouts naturels dont nous disposons, pour créer une vie plaisante remplie de satisfactions.

Faire de notre vie une œuvre d’art, implique d’accepter l’idée que notre création ne sera jamais achevée.

 « Notre vie ne vaut plus seulement la PEINE d’être vécue

Mais aussi la JOIE d’être expérimentée. »

Paolo DOSS

 Croire en notre potentiel vertueux…